e long de la période qui part des petits-fils de Clovis (VI°s) et qui rejoint les héritiers de Charlemagne (X°s), lart du Haut Moyen Age présente certains caractères nordiques et celtiques. Constitués de bandes enlacées de manière symétrique surnommées entrelacs, arborant parfois en leurs extrémités des figures de bêtes fantastiques, serpents ou rapaces, ces motifs se multiplient dans lart de lorfèvrerie mérovingienne et sur quelques sculptures déglises avant de se retrouver dans les nombreux manuscrits de la Renaissance carolingienne. Avant même de définir ce que lon peut qualifier de celtique, il est nécessaire de connaître le contexte sur lequel lart du Regnum Francorum sest agrémenté de telles compositions. Un regard sera donc porté sur la présence des Celtes sur le continent à lépoque suivant les grandes invasions germaniques. A lépoque de la Tène, lEurope était en grande majorité soumise à des peuplades celtiques. Sept siècles plus tard, les derniers celtes situés dans les îles de Bretagne et dIrlande restent cloisonnés aux fins fonds de lOccident. Les Britons subissant à leur tour les coups de boutoir des hordes dAngles et de Saxons, trouvent leur salut dans lémigration massive vers lArmorique et la Galice espagnole et constituent une multitude de petits royaumes sans cesse en guerre. Plus tard, dans le Royaume des Francs lui-même en proie aux faides, débarque avec douze de ses disciples, un moine irlandais du nom de Colomban mettant ainsi en place le grand mouvement du monachisme irlandais qui perdura jusquau IX°s. Dans ce courant spirituel celtique qui senracine dans les monastères continentaux, sinsèrent nombre dartistes orfèvres et enlumineurs venus des îles. LOccident barbare senrichit de multiples influences méditerranéennes (lombardes et byzantines) et nordiques (scandinaves ou celtes). Cest dans ce creuset que se détache cette spécificité celtique. Lorfèvrerie que lon trouve dans les tombes de rois, daristocrates et de guerriers germaniques constitue le premier témoignage des caractères artistiques dont sentoure la société mérovingienne. Dans cette diversité de motifs, cloisonnés de formes géométriques dorigine sarmate, fibules aviformes, boucles de ceinture incisées de rosaces, de svastikas, de triskels ou de symboles chrétiens, se détachent vers le VII°s, en parallèle avec les techniques de lestampage et de létamage, des lacets qui sentremêlent de manière claire et symétrique, souvent imagés de serpents ou de dragons sentre dévorant. Bien que ces entrelacs ne constituent rien de spécifiquement celte ou chrétien, on établira au cours de ce mémoire en quoi les rapports entre les peuples nordiques sont étroits et sinfluencent dune manière telle quil est difficile den séparer les caractères communs ou intrusifs. A la fin du règne des mérovingiens, lhabitude denterrer les défunts en compagnie de leurs objets personnels se perd. Cest alors dans les enluminures des manuscrits que lon trouve les témoignages dun art celte christianisé inspiré des travaux réalisés dès le début du VIII°s dans les monastères irlandais. Copies dévangiles, de textes des Pères de lEglise ou manuscrits antiques, les scriptoria multiplient les ouvrages destinés aux ecclésiastiques ou aux princes de la Cour. Cest en effet dans le cadre de la Renaissance carolingienne que se perpétuent les techniques des fameux enlumineurs irlandais et que sinsèrent les innovations des autochtones qui renouvellent les modes au gré des goûts dominants. Cest ainsi quaprès avoir connu une éclipse sous le règne de Louis le Pieux, les types celtiques de lenluminure reviennent à la faveur du temps de Charles le Chauve. Avec la dissolution de lhéritage carolingien, suite au traité de Verdun et aux attaques meurtrières des Vikings, les nouveaux pouvoirs se détachent des anciens canons de lArt pour accomplir la genèse de lArt Roman. Les caractéristiques celtes ne transparaîtront désormais plus que comme vague souvenir dans des chapiteaux de type roman, dans certaines enluminures occidentales des XII° et XIII°s et dans les formes développées de lart Ottonien.
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