III L'orfèvrerie

Etude des sépultures :

es tribus germaniques qui s’installèrent dans les frontières internes de l’empire romain étaient encore des semi-nomades. La plupart d’entre elles étaient déjà au service de Rome depuis le III°s, il s’agissait des Lètes (laeti), dont on remarque la présence dans de nombreux cimetières du Nord de la Gaule, puisque ceux-ci étaient enterrés avec leurs armes et leur parure.k

k Archéologia n° 333, avril 1997, article de Patrick Périn : Les Francs, précurseurs de l’Europe ; p. 28/38.

     Leurs successeurs s’étaient établis en plus grand nombre dès le IV°s dans ces mêmes zones par le biais de traités de fédération (foederati) signés avec les autorités romaines.j

     A cette période, les modes d’inhumation diffèrent selon l’origine ethnique ou culturelle du défunt. En majorité, les tombes des autochtones sont stériles, le dépôt de matériel funéraire important étant condamné par les juristes. On trouve toutefois quelques exceptions, on signale le testament du Lingon exprimant la volonté d’un chasseur d’être enterré avec tout son attirailk ou l’exemple de la femme artiste de St Médard des Prés en Vendée inhumée avec 27 vases et son matériel de peinture.l

     Les gallo-romains de religion chrétienne n’emportaient avec eux qu’un simple calice et un suaire de couleur blanche.

     Les barbares avaient, quant à eux, cette tradition de partir dans le royaume des morts avec leur plus belle parure et leur armement. L’écrivain Jordanès décrit les funérailles d’Alaric et d’Attila dans " l’origine des Goths ".m Si ces exemples , du fait de leur ampleur, ne sont pas comparables, ils révèlent un comportement commun aux barbares ; c’est à dire que le mort, vivant dans l’au-delà, conservait des droits imprescriptibles sur une partie de sa succession et sur les objets mobiliers en particulier. Ce mobilier personnel était constitué de l’Heergewate, équipement militaire de l’homme et du Gerade, parure féminine et bijoux. La pratique de l’incinération chez les Francs était, par ailleurs, courante au Bas Empire.

j Karl Ferdinand Werner : Childéric Clovis, rois des Francs. Catalogue d’exposition, Tournai, 1981 ; p. 8 : Au départ, les Francs saliens installés en Toxandrie (entre l’Escaut et la Meuse) en 358 par l’empereur Julien, sont considérés comme déditices (barbares vaincus recevant des terres contre l’obligation d’un service militaire), ils étaient passés au statut de fédérés en 335 et avaient, peu à peu étendu leur territoire à la Somme.

k J.J. Hatt : La tombe gallo-romaine, Paris, 1951 ; p. 65/66.

l Edouard Salin : La civilisation mérovingienne d’après les sépultures, les textes et le laboratoire, t. I, p. 27.

m Jordanes : De Getarum sive Gothorum origine ac rebus gestis, Alaric : MGH, XXX, t. V, p. 99. Attila : MGH, XLIX, t. V, p. 124.

     On a longtemps déduit l’origine du mort par la nature des tombes découvertes, on sait maintenant que des gallo-romains s’adaptèrent progressivement à la coutume de l’inhumation à mobilier et que les Francs abandonnèrent celle de l’incinération en s’éloignant de leur terre d’origine.j La tombe ne reflète donc pas l’appartenance religieuse de l’individu qui s’y trouve, pas plus que la découverte d’armes ne fait de lui un guerrier.

     Par contre, on différencie l’appartenance sociale d’un mort en fonction de la richesse de son mobilier, on rencontre donc de nombreuses tombes de chefs dans les anciens " Champs décumates " et " Champs catalauniques " ( zones comprises entre les cours supérieurs du Danube et du Rhin ainsi qu’entre le Rhin et la Seine). On a donc répertorié, pour la France, les sépultures d’Arcy Ste Restitue, Louvres en Parisis, Mézières, Lavoye, Chaouilley…sans oublier celle de Childéric, père de Clovis, à Tournai, découverte en 1653.

     Les Francs et les autres peuples germaniques furent enterrés selon des modes équivalents d’orientation et de fréquence, mais, peu à peu, ils se disséminèrent et se fondirent dans la masse des autochtones et leurs tombes, qui présentent un caractère moindre du point de vue artistique, se vidèrent complètement suite à la christianisation.

j Patrick Périn in " Les Francs précurseurs de l’Europe ", Archéologia n° 333, op. cit., p. 35

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